1998. Trois ans ont é depuis les événements de Terminator 2. Le Jugement dernier prévu le 29 août 1997 n’a pas eu lieu. Recherchés par les autorités, Sarah et son fils John Connor vivent sous de faux nom et s’installent de ville en ville, restant toujours sur leurs gardes. De terribles visions d’apocalypse hantent toujours le sommeil de Sarah, l’incitant à croire que la traque n’est pas terminée. À leur arrivée dans une nouvelle ville, John sympathise avec Cameron une camarade de classe. Leur professeur, Monsieur Cromartie, s’installe alors à son bureau et fait l’appel. En nommant l’alias de John, il essaie alors aussitôt d’abattre le jeune homme. Mais Cameron s’interpose et affronte Cromartie, tous deux révélant leur nature de machines. Traqués par Cromartie, Sarah et John, aidés de Cameron, décident alors de trouver un moyen de voyager dans le temps et de se projeter en 2007, année où sera finalement conçu Skynet, selon les données de Cameron. Mais Cromartie, partiellement détruit lors de leur affrontement, parvient à les suivre.
Produite par C2-Pictures à la suite de la sortie en salles de Terminator 3, Terminator : Les Chroniques de Sarah Connor fut une série aussi intéressante que brève. Brève dans la mesure où elle ne compte que deux saisons à l’intrigue inachevée, faute d’audiences suffisantes outre-atlantique. Intéressante car elle proposait une alternative originale aux trois premiers films qui étaient tous basés sur le même postulat de course-poursuite (une machine increvable, un protecteur plus vulnérable, une fuite en avant).
Mais soyons réaliste, là où Terminator 3 par exemple faisait le job en proposant du spectacle mais ne racontait rien d’innovant, Les Chroniques de Sarah Connor, de par son format feuilletonnesque, osait ce qui était impossible sur le grand écran : développer tout un pan de la mythologie Terminator jusque-là ignoré dans les films de la saga.
Il faut tout d’abord savoir que l’intrigue de la série fait suite à T2 et ouvre sur une ligne temporelle différente de Terminator 3. Les événements du 3ème film n’auront pas lieu, même si Sarah finit par découvrir qu’elle est atteinte d’une leucémie. La fin du pilote de la série ouvre donc sur une autre ligne temporelle/voie narrative (niveau multivers, Marvel n’a bien sûr rien inventé) où, bien qu’ils soient pistés par un T-850 particulièrement tenace (le dénommé Cromartie), les héros se fixent pour objectif de trouver l’inventeur du logiciel qui deviendra Skynet afin d’enrayer son développement. Or, ils découvrent vite que le Skynet du futur a pris les devants et que, en amont de son Jugement dernier, celui-ci prépare déjà dans le présent ses futures troupes (voir l’épisode 4 de la saison une). Dans le même temps, Cromartie en partie détruit parvient à retrouver forme humaine grâce à un chirurgien plasticien et même un nouveau visage. Tandis qu’il se lance à nouveau sur la piste des héros, ceux-ci découvrent tout un réseau de résistants humains venus du futur et se préparant eux aussi à contrer Skynet.
La série ouvre donc des pistes narratives inédites, nourrissant la chronologie Terminator en ne centrant plus uniquement son canevas sur une banale course-poursuite. Ici, les humains du futur organisent les prémisses de la résistances, certains traîtres se vendent à l’ennemi (comme dans Matrix), Skynet envoie d’autres T-800 non pas pour traquer John mais pour collecter et entreposer les ressources dont il aura besoin pour la fabrication de ses légions de robots, et de son côté, un T-1000 (en fait un T-1001) à la singularité hors-norme usurpe l’identité de la PDG d’une corporation pour mettre la main sur un vulgaire petit logiciel de jeu d’échecs, baptisé "Le Turc" par son créateur. Un vulgaire logiciel de jeu d’échecs destiné à devenir Skynet.
L’intérêt de la série se trouve donc non seulement dans l’originalité de ses sous-intrigues que dans la façon dont elle développe les liens entre ses protagonistes. Traqué par l’agent du FBI Ellison (clin d’oeil à l’écrivain Harlan Ellison), Sarah se sait condamnée par la maladie mais choisit de ne rien dire. John, lui, sympathise avec la froide Cameron (clin d’oeil à James Cameron bien sûr), persuadé de pouvoir l’humaniser. Le trio sera bientôt ret par un allié de choix, Derek Reese, le frère aîné de Kyle.
Mais même les "vilaines" machines de la série sont intéressantes dans la mesure où les scénaristes prennent le parti d’en développer l’ambiguïté. Ainsi de cette PDG, Catherine Weaver, dont la petite fille, Savannah, ne cesse de la dévisager comme une inconnue, sachant instinctivement qu’il ne s’agit plus de sa mère. Pour autant, l’imposteure, un T-1001, malgré ses difficultés à comprendre les émotions humaines, tentera de jouer son rôle de mère, non seulement envers la fillette, mais aussi envers le logiciel "’le Turc". Incapable d’en comprendre le raisonnement au fur et à mesure de son développement, elle fera appel à un psychologue pour interagir avec le logiciel et parfaire son éducation en lui permettant de comprendre ce qu’est l’humanité.
Le principal antagoniste Cromartie, lui, reste relégué à son rôle de poursuivant increvable mais dont la trajectoire sera parsemée de rencontres qui laisseront transparaître un infime potentiel d’humanisation du personnage. À ce titre, James Cameron et Tim Miller en développeront l’idée dans leur Dark Fate avec le T-800 de Schwarzy.
Sans être irréprochable (parfois trop de blabla et trop peu d’action), la série aligne les bonnes idées ainsi que les scènes mémorables. De ce T-800 s’enfermant dans son bunker en se mettant en veille comme un cerbère attendant le Jugement dernier, à cet épisode où les résistants torturent un traître à la race humaine, en ant par ce joli age où John rencontre son père encore enfant et cette tuerie d’anthologie où Cromartie extermine toute une unité des forces spéciales sur la chanson aux paroles bibliques de Johnny Cash The Man comes around, l’intrigue de la série développe intelligemment la mythologie de l’univers créé par James Cameron jusqu’à faire revenir un personnage comme le Docteur Silberman, devenu fou depuis qu’il a vu le T-1000 traverser les barreaux de la porte de sécurité dans Terminator 2.
Le casting n’est pas en reste. Pas encore connue de tous pour son rôle de Cersei Lannister, Lena Headey (Dredd) reprend avec tout ce qu’il faut de charisme et de justesse le rôle de Sarah Connor, allant même, un peu comme Mads Mikkelsen avec Hannibal, jusqu’à faire oublier Linda Hamilton. Thomas Dekker (Vampire diaries) hérite du rôle ingrat de John Connor, Brian Austin Green (Beverly Hills 90210) étonne dans son rôle d’oncle de John, et la belle Summer Glau (Serenity) fascine par sa beauté et sa froideur de protectrice. Chanteuse du groupe Garbage, Shirley Manson s’avère particulièrement ambivalente dans son rôle de maman T-1000 quand Garrett Dillahunt (No country for old men), principale incarnation de Cromartie (après Owen Yeoman dans le pilote), déploie un charisme remarquable en incarnant un antagoniste redoutable mais pas aussi marmoréen que ses prédécesseurs. Tel un Pinocchio de l’apocalypse apprenant sans cesse des humains sur son chemin, il est le seul Terminator à avoir eu le privilège d’être nommé par ses adversaires.
Avec toute cette floppée de qualités, il est donc plutôt dommage que l’audience américaine n’ait pas suivi, comdamnant la série un peu comme Le Turc finira par condamner l’humanité : à l’annulation pure et simple. C’est con car, format télévisuel mis à part, la suite aurait certainement été plus ionnante et créative que ce qu’ils feront au cinéma par la suite.